La promotion des droits des enfants handicapés
Avec l’application, dans le monde entier, de la Convention relative aux droits de l’enfant et de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, il est possible de changer la façon dont on assure la promotion, la protection et l’exercice des droits des enfants handicapés. Ce changement s’impose de toute urgence !
Tout au long de leur vie, les enfants handicapés sont exposés à la stigmatisation, à la discrimination, aux préjugés culturels et aux stéréotypes et ne bénéficient d’absolument aucune attention. Malheureusement, ils courent également davantage le risque d’être victimes de violences, de négligences, de blessures et d’exploitation.
Même si les données et les études en la matière sont peu nombreuses, il ressort des informations disponibles que ces enfants sont particulièrement exposés à la violence, du fait qu’ils sont plus vulnérables aux violences physiques et émotionnelles lorsqu’ils sont jeunes et davantage exposés aux atteintes sexuelles à la puberté.
Trop souvent encore, les enfants handicapés sont considérés comme une malédiction, une source de honte pour leur famille et un malheur pour leur communauté. Dans certains pays, on attribue le handicap de l’enfant à la sorcellerie ou aux mauvais esprits qui l’habiteraient. Pour l’exorciser, on prive l’enfant de nourriture, on l’expose à des températures extrêmement basses ou élevées, voire aux flammes, et on le passe à tabac.
Lorsqu’on les force à mendier, les enfants handicapés sont victimes de violence et contraints de rester dans la rue, subissent des violences physiques et sont torturés de manière à ce qu’ils attirent l’attention des passants et suscitent leur charité.
À l’école, dont la qualité laisse souvent à désirer, ils sont mis à l’écart et battus, harcelés et maltraités par des enseignants mal préparés qui ne comprennent pas leurs besoins spéciaux et ne peuvent y répondre. Leurs camarades de classe leur réservent le même traitement.
Lorsqu’ils sont placés dans des institutions d’accueil dont le personnel est mal formé, mal payé et souvent frustré, et qu’ils doivent faire face aux comportements stigmatisants, ils courent un risque extrêmement élevé de faire l’objet de violence physique, verbale et psychologique.
Les familles qui ont des enfants handicapés doivent faire face aux nombreux besoins de ceux-ci et composer avec un niveau de stress élevé, sans appui social ou médical, sans savoir à quels services et à quelles prestations elles ont droit, tout cela dans un sentiment profond d’isolement qui accentue le risque de violence dans le foyer. Certaines familles font davantage preuve de négligence que de violence ; d’autres isolent l’enfant et limitent ses contacts avec le monde extérieur, y compris pour éviter qu’il ou elle ne soit exposé(e) à la maltraitance ou à la stigmatisation – souvent dans des conditions déplorables, dans une pièce sans fenêtre ou à l’extérieur sous une chaleur accablante. D’autres encore commettent des « meurtres par compassion » pour mettre fin aux souffrances de l’enfant, parfois sous la pression ou sur les conseils d’autres membres de leur famille ou de membres influents de leur communauté.
Lorsque des faits de violence surviennent, la plupart des enfants ne savent où aller ni qui appeler pour obtenir des conseils et du soutien. Ils se sentent forcés de garder les faits pour eux, par crainte d’être à nouveau stigmatisés, harcelés ou abandonnés ou d’être victimes de représailles. Pour les enfants handicapés, la situation est encore plus difficile !
Ils sont plus susceptibles de subir des violences physiques, psychologiques ou sexuelles, sont rarement visés par les programmes d’orientation ou de prévention et attirent moins l’attention des services de protection. Il leur est encore plus difficile de dénoncer les faits de violence et de s’en prémunir.
Certains sont peu enclins à porter plainte, de peur de perdre le soutien de leur entourage aidant et de ne plus bénéficier de l’attention et de l’affection de ceux dont ils dépendent, ou simplement de ne plus avoir accès à l’éducation ou à des services d’aide, faute d’autre solution.
Lorsqu’elles existent, les institutions où ils pourraient obtenir de l’aide, signaler les faits ou porter plainte ne leur sont pas toujours accessibles physiquement. Par ailleurs, les enfants y trouvent rarement des informations adaptées qu’ils pourraient utiliser et n’y obtiennent pas toujours le soutien dont ils ont besoin et auquel ils ont droit.
De plus, lorsque des faits sont dénoncés par des enfants handicapés, ils sont rarement pris au sérieux par le personnel, qui n’est pas formé ni préparé pour y répondre. Il existe une idée répandue selon laquelle les enfants handicapés ont tendance à tenir des propos confus et sont incapables de raconter ce qui leur est arrivé ou de fournir un témoignage convaincant et précis. Trop souvent encore, le système de justice est loin d’être adapté aux enfants et ne tient pas compte du handicap.
Les difficultés que rencontre un enfant aveugle pour identifier un agresseur sexuel l’illustrent bien. Dans de nombreux pays, d’autres obstacles persistent. Par exemple, il arrive que le témoignage d’un enfant handicapé devant un tribunal n’ait aucune valeur en vertu de la législation, et que cet enfant ne puisse prêter serment ni signer de documents officiels.
Tous ces facteurs contribuent à faire passer sous silence les faits de violence commis contre des enfants et à favoriser un fort sentiment d’impunité.
Il faut impérativement inverser cette tendance ! Tous les pays devraient adopter des lois interdisant toutes les formes de violence contre les enfants – tous les enfants, y compris les enfants handicapés – dans tous les contextes ! Il faut mettre en place d’urgence, dans tous les pays, des dispositifs efficaces et correctement financés pour prévenir et combattre les actes de violence commis contre les enfants et les handicapés. Il est indispensable d’investir dans les activités de sensibilisation et de communication, y compris en commandant des études sur le handicap chez l’enfant et sur les formes de violence qui empêchent les enfants d’exercer leurs droits et sur leur prévalence.
Plus que jamais, nous devons travailler main dans la main avec les enfants et les jeunes handicapés, avec leurs familles et avec les organisations qui promeuvent la protection de leurs droits.
Cette année, le débat de l’Assemblée générale sur les droits des enfants handicapés est pour nous l’occasion unique de faire un bond en avant dans la promotion des droits des enfants handicapés et d’accélérer la mise sur pied de dispositifs efficaces et correctement financés pour prévenir et combattre les actes de violence.
Il s’agit là d’une occasion que nous ne pouvons pas laisser passer !
Mme Marta Santos Pais,
New York, 20 juin 2013