La protection des enfants contre la violence : un impératif en matière de droits de la personne

La protection des enfants contre toutes les formes de violence est un droit fondamental, que la communauté internationale s’est fermement engagée à garantir à tous les enfants, partout et en tout temps. Malheureusement, la violence demeure une dure réalité pour des millions d’enfants à travers le monde. La violence inhibe le développement de l’enfant, entrave ses capacités d’apprentissage et compromet ses résultats scolaires. Elle fait obstacle à des relations harmonieuses, entraîne une faible estime de soi et est source de troubles affectifs et de dépression, allant jusqu’à provoquer prises de risques, automutilations et agressivité. Qui plus est, la violence entraîne des coûts économiques élevés pour la société, atrophiant les capacités humaines et compromettant le développement social.

Les études dont nous disposons nous permettent de penser que le nombre d’enfants subissant la violence, sous une forme ou une autre, dans le monde, s’élève jusqu’à 1,5 milliard par an. La violence est présente dans tous les contextes, notamment dans ceux qui devraient normalement offrir aux enfants une sécurité et une protection spéciale, soit les établissements de soins, l’école et le foyer. Les plus jeunes sont particulièrement exposés, puisqu’ils sont moins à même de s’exprimer et de demander de l’aide, avec le risque accru de séquelles psychiques et physiques irréversibles que cela comporte.

Se propageant telle une épidémie, la violence à l’égard des enfants reste pourtant cachée et tolérée par la société, souvent perçue comme un tabou ou comme une forme de discipline nécessaire. Elle est rarement dénoncée, ce qui explique pourquoi les statistiques officielles n’en reflètent guère l’ampleur ou la fréquence. La violence est souvent le fait de personnes connues des enfants et qui jouissent de leur confiance, si bien que les victimes se sentent, ouvertement ou implicitement, contraintes de se taire. Ce phénomène répandu s’entoure d’une culture du silence, du secret et de l’indifférence sociale, ouvrant ainsi la voie à une impunité généralisée.

Or, il s’inscrit dans un cercle vicieux que nous devons briser de toute urgence. Si elle n’intéresse actuellement qu’une minorité, la protection des enfants contre la violence doit devenir une priorité universelle.

Pour lutter contre le profond impact de la violence sur les enfants, l’Organisation des Nations Unies a mené une étude mondiale sur ce thème, créant, en 2009, le poste de Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question de la violence contre les enfants, afin de faire durablement de cette question une priorité politique et de promouvoir une action constante visant à prévenir et à combattre toute forme de violence.

La violence compromet les droits fondamentaux de millions d’enfants ; pour autant, elle n’est pas une fatalité : elle peut, en effet, être évitée et éliminée.

C’est dans cet esprit que, dans le cadre de mon mandat de Représentante spéciale du Secrétaire général, je souligne l’urgence qu’il y a à mettre en place, dans chaque pays, une stratégie nationale coordonnée et dotée des ressources nécessaires, destinée à éliminer la violence à l’égard des enfants ; à promouvoir l’adoption et l’application de lois visant à bannir toutes les formes de violence à l’égard des enfants, où qu’elles se produisent, y compris au sein de la famille, et à regrouper les données et les recherches consacrées à ce phénomène pour le rendre visible et pour établir des lois et des politiques qui permettent de l’éliminer.

Une volonté politique forte permettra de faire de la question de la protection de enfants contre la violence une priorité publique en la plaçant au cœur des stratégies nationales ; ainsi, nous pourrons bâtir un monde qui ne laisse aucune place à la violence !

Marta Santos Pais
New York, le 4 février 2011